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Gaz anesthésiques : invisibles, inodores mais polluants

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Les gaz utilisés pour l’anesthésie des patients sont invisibles et souvent inodores, mais ils engendrent une pollution bien réelle.

Faiblement métabolisés par l’Homme, environ 95 % de ces gaz sont éliminés par voie respiratoire et se retrouvent dans l’atmosphère via les systèmes d’évacuation d’air des établissements. Parmi les gaz utilisés, le protoxyde d’azote fait partie des six polluants ciblés par le protocole de Kyoto. « Le potentiel de réchauffement global varie d’un gaz anesthésique à l’autre, les anesthésistes – réanimateurs peuvent réduire l’empreinte carbone de l’anesthésie inhalée sans inconvénient pour le patient. Le principal obstacle réside dans l’ignorance des enjeux par les équipes d’où l’importance d’une démarche collective éclairée » témoigne Dr Jane Muret, anesthésiste-réanimatrice. L’anesthésie inhalée représente 75 % des anesthésies générales en France.

Comprendre en un coup d’œil l’impact d’une heure d’anesthésie inhalée

 Équivalent en voiture avec 30 % d’O2 et un débit de gaz frais (DGF) de 1 litre :
– 10 km pour le sévoflurane (2,5 %),
– 376 km pour le desflurane (5 %).

Équivalent en voiture avec 30 % de protoxyde d’azote et un DGF de 1 litre :
– 77 km pour le sévoflurane (2,5 %),
– 443 km pour le desflurane (5 %).
Source : SFAR GREEN 2020

Comment agir ?

Pour commencer, on nomme un référent « anesthésie bas carbone » à l’échelle pertinente pour l’établissement. Sa première mission consiste à faire un état des lieux en matière de consommation de gaz sur une période donnée avec le concours de la pharmacie (méthode indirecte reposant sur la quantité de gaz acheté). En parallèle, il s’agit d’engager le dialogue avec les collègues, de sensibiliser et former les équipes et notamment les étudiants à l’anesthésie bas carbone. À noter : il existe des applications pour smartphones comme l’Anaesthetic impact calculator de Sleekwater software, elles sont pédagogiques et gratuites.

Éliminer en priorité le protoxyde d’azote

Au regard de son impact sur la couche d’ozone, il s’agit d’éliminer en priorité le protoxyde d’azote au bloc opératoire, sans oublier de condamner les tuyaux d’alimentation. En dehors des plateaux techniques, il est recommandé de limiter le recours aux bouteilles de mélanges équimolaire O2/N2O.
Dès lors que le bénéfice pour le patient est équivalent, le sévoflurane est préféré au desflurane. À l’induction et en entretien, on travaille en circuit fermé (DGF ≤1l/min voire ≤500 ml/min si le respirateur le permet). Si disponible sur l’appareil, on travaille en mode Anesthésie Inhalatoire à Objectif de Concentration (AINOC).  

Pour avancer, il est essentiel de construire collectivement un protocole de service comprenant une démarche d’amélioration continue afin de diminuer l’impact environnemental lié à l’utilisation des gaz anesthésiques inhalés. Il en va de même pour l’introduction de méthodes alternatives aux gaz inhalées comme l’hypnose ou l’anesthésie loco-régionale.

Pour perfectionner, on installe des systèmes qui permettent de capturer et de réutiliser les gaz d’anesthésie. Il s’agit également de faire des travaux scientifiques pour valider l’innocuité à travailler en débit de gaz frais minimum (i.e. besoins métaboliques en oxygène) qui réduit massivement la consommation de gaz halogénés.



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