CHU CLERMONT-FERRAND
À la maternité du CHU de Clermont-Ferrand, l’usage unique n’est pas systématique
À la maternité du CHU de Clermont-Ferrand, ce sont 3 600 accouchements qui sont réalisés chaque année et autant de sets à usage unique jetés. L’établissement a décidé de passer aux dispositifs médicaux réutilisables pour les packs d’accouchement par voie basse. Il aura fallu un an à l’ équipe pour mettre ce projet en place, après une étude comparative sur trois piliers : économique, environnemental et social.
« À l’époque quand nous avons lancé cette étude, la maternité était déjà très engagée en matière de développement durable, puisqu’elle venait d’être labelisée THQSE, niveau or », explique Steffi Calland, Pharmacienne au sein de la Stérilisation de territoire du CHU de Clermont-Ferrand. « En mai 2022, notre nouveau service de stérilisation a ouvert, avec une forte augmentation de la capacité de production. Nous avons réinternalisé l’activité de stérilisation du site où se trouve la maternité, qui était auparavant externalisée à Lyon. Le fait d’avoir ouvert notre propre stérilisation a été l’occasion de se poser la question : est-ce qu’on ne pourrait pas repasser à des dispositifs médicaux réutilisables ? »
La maternité a défini deux scénarii comparatifs, l’un à usage unique, le second, pensé avec les sages femmes de la maternité et les obstétriciens : « C’est un plateau d’instruments réutilisables avec tout le nécessaire à l’intérieur pour faire à la fois l’accouchement, la suture ou l’épisiotomie si besoin. En revanche, nous avons gardé dans ce scénario les champs et les compresses à usage unique que l’on ne peut pas stériliser. En parallèle, nous avons mis en test trois plateaux d’accouchement réutilisables ».
3 fois moins d’émissions de gaz à effet de serre pour le réutilisable
Pour comparer les deux scénarios sur le volet environnemental, la maternité a réalisé une analyse de cycle de vie des produits. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : l’utilisation des dispositifs médicaux à usage unique (DMUU) représente environ 38 tonnes de CO2 par an, contre 12 tonnes dans le cas du scénario réutilisable. Sur les consommations d’eau, ce sont 1 300 m3 consommés par an avec le scénario à usage unique, contre 238 m3 pour le réutilisable.
« Quand nous avons fait notre recueil de données auprès des fournisseurs pour le pack d’épisiotomie, nous avons découvert que certains matériaux viennent de Chine, du Pakistan, d’Israël, d’Espagne. Ces produits, acheminés au Maroc pour être assemblés et stérilisés, sont ensuite envoyés en France pour être stockés et distribués dans les établissements de soins. Les chiffres l’ont confirmé mais c’est quand même dingue que ces dispositifs médicaux, qui ont fait le tour du monde, finissent dans la poubelle assez rapidement ! »
D’autres impacts sont aussi pris en compte dans l’étude, comme la toxicité environnementale, les acidifications des eaux marines, les toxicités humaines et les consommations d’eau.
« Selon les résultats de l’étude, en passant de l’usage unique au réutilisable sur une année, nous économisons en termes d’émission carbone l’équivalent de trois tours du monde en voiture. En termes d’écotoxicité marine, la mort de tous les poissons dans un équivalent de 4,5 lacs Pavin, pour la toxicité humaine c’est l’équivalent de 9 millions de boules antimites, pour la consommation d’eau l’équivalent de quatre piscines municipales ».
64 centimes d’écart par intervention
Sur le volet économique, la maternité a fait un comparatif en coût global, en prenant en compte le coût d’achat des dispositifs médicaux, l’élimination des déchets, le coût de pré-désinfection et le coût de stérilisation : « On est à peu près à 87 000 euros sur l’année pour le réutilisable. Et pour l’usage unique nous sommes à 85 000 euros. Cela représente un différentiel de 64 centimes par intervention (24,22 € contre 24,86 €) ».
Pour le volet social, des questionnaires de ressentis avec une cotation du stress et de l’aisance ont été proposés à tous les utilisateurs et tous les professionnels de santé qui interviennent dans la chaine des DM.
« Pour l’instant, tout se passe bien avec nos dispositifs médicaux réutilisables. Nous évaluerons dans quelques temps notre circuit pour savoir si les professionnels de santé sont satisfaits du matériel. Un nouveau bilan économique sera nécessaire, notamment pour réévaluer le coût de la stérilisation avec l’augmentation des prix de l’énergie ».