Depuis près de dix ans, le CHU de Dijon (21) a mis en place une politique rigoureuse de réduction des DASRI, pilotée par Florent Guillemin, responsable gestion des déchets, transport et logistique. Aujourd’hui, 266 tonnes de DASRI transitent chaque année vers le centre d’incinération proche de quelques km, alors que le volume de déchets infectieux produit par le CHU dépassait les 400 tonnes en 2010. La crise du Covid-19 modifie fortement les volumes et nous conduit à relever un nouveau défi.
« Le tonnage mensuel collecté en mars a connu une augmentation jusqu’à mai, et a doublé pour le mois d’avril ! », explique Florent Guillemin. « Le CHU de Dijon a accueilli 2 451 patients hospitalisés à la suite de la crise du Covid-19, dont 184 en réanimation. Nos volumes de déchets infectieux ont ainsi augmenté de manière importante, du fait de l’usage massif et nécessaire d’équipements de protection. La crise sanitaire renforce la contrainte des risques infectieux et le ressenti psycho-émotionnel et favorisent naturellement l’hyper-vigilance, au détriment parfois de comportements plus rationnels mais qui garantissent également la sécurité sanitaire. Aussi, pendant la crise du Covid-19, de nombreuses filières de tri mises en place au fil des années ont été délaissées par les agents, en temps normal très impliqués, et le volume des DASRI pour les mois de mars à mai a doublé, passant de 20 à plus de 40 tonnes pour le seul mois d’avril. Cette situation conduit non seulement à une perte de ressources puisque 90 % des DASRI sont normalement recyclables (un sac DASRI est composé pour son essentiel de carton, papier, plastique), mais aussi un surcoût considérable pour le CHU puisque le coût de traitement à la tonne de DASRI est quatre fois plus élevé qu’une tonne de déchets assimilables aux ordures ménagères (DAOM). Globalement, ce sont des années d’efforts qui sont mises entre parenthèses actuellement. Pourrons-nous renouer avec nos bonnes pratiques d’avant le Covid-19 ? En combien de temps ?«
« J’espère que cette pandémie nous permettra de questionner à nouveau nos pratiques, celles des achats en premier lieu, puis ensuite celles relatives au traitement des déchets. Nous avons vécu ces dernières semaines des expériences intéressantes sur notre territoire, qu’il faudra peut-être pérenniser une fois la vague du Covid-19 passée. Des accords avec des entreprises régionales ont permis de développer, et de s’approvisionner en masques et blouses en tissu lavable, un moyen simple pour diminuer l’usage unique et les volumes de déchets ! D’autre part, la loi qui régit les DASRI date de 1997, une époque durablement marquée par le scandale du sang contaminé, et qui avait déjà imposé l’hyper-sécurité vis-à-vis des déchets infectieux et favorisé le recours à l’usage unique. De nombreux pays en Europe ont depuis longtemps adopté des législations beaucoup plus souples concernant les DASRI. En France, certains déchets traités comme des DASRI à l’hôpital sont, pour des raisons principalement de logistique, traités comme des déchets ménagers s’ils sont produits en ville, ce qui ne remet pas en cause la sécurité sanitaire. Une fois la pression descendue, j’espère qu’une réflexion sur nos comportements vis-à-vis de nos déchets en période de crise pourra avoir lieu afin de définir des protocoles précis à respecter si une nouvelle vague devait venir. Un temps de réflexion aurait été nécessaire en début de vague du Covid-19, mais sincèrement nous avons tous été surpris par l’ampleur de la crise. »