boite-rose-maternite

ANAP

Le télétravail, c’est aussi pour les soignants !

Invitée au Club RH du C2DS, l’ANAP – Agence Nationale de la performance sanitaire et médico-sociale- présentait son guide « Le télétravail : désormais indispensable, totalement à votre portée ». Un guide qui donne les clés pour comprendre, ajuster et réussir la mise en place du télétravail dans les établissements sanitaires et médico-sociaux.

Que dit le code du travail ?

C’est avec la loi dite « Loi Warsmann » de 2012 que la notion de télétravail est introduite dans le code du travail à l’article L1222-9. Selon la loi, « le télétravail désigne toute forme d’organisation du travail dans laquelle un travail qui aurait également pu être exécuté dans les locaux de l’employeur est effectué par un salarié hors de ces locaux de façon régulière et volontaire en utilisant les technologies de l’information et de la communication dans le cadre d’un contrat de travail ou d’un avenant à celui-ci « . 

Aurélien Pierre, directeur des soins, expert ressources humaines à l’ANAP : « Il y a une notion qui est intéressante dans cette définition du télétravail, c’est celle de volontariat. Il est en effet impossible d’imposer le télétravail à un professionnel, sauf situation de crise, comme la pandémie Covid 19. Le caractère régulier du travail est également à prendre en compte. C’est-à-dire que si vous avez trois jours dans l’année de télétravail, ça ne peut pas être défini comme du télétravail. Il y a vraiment cette notion de régularité ».

Le télétravail accroît la productivité et l’attractivité

Selon la littérature scientifique, le télétravail améliore la productivité et la performance individuelle des salariés. Aurélien Pierre : « Trois études publiées (*) sur le sujet en 2020 ont montré que les employés bénéficiant du télétravail pouvaient augmenter leur productivité jusqu’à 13%, sans que leur travail ne subisse de perte de qualité. Le télétravail peut aussi accroître l’attractivité de l’entreprise. Une offre d’emploi publiée qui propose 80% de télétravail touche 25 fois plus de candidats potentiels. Il y a un réel intérêt à le proposer dans les fiches de poste ».

Réduire les trajets domicile-travail, c’est réduire l’impact environnemental

Le télétravail a aussi l’avantage indéniable de réduire les trajets quotidiens entre le domicile et le lieu de travail. Non seulement cela réduit l’impact environnemental liés à ces déplacements, mais c’est aussi pour le salarié un gain de temps significatif.

Aurélien Pierre : « En réduisant les déplacements quotidiens pour se rendre au travail, les professionnels peuvent réaliser des économies significatives sur les coûts de transports. Je pense au carburant, aux péages, aux tickets de transports en commun, l’usure du véhicule, etc. Cela permet aux professionnels de gagner du temps, de l’énergie, et de réduire le stress lié aux transports. Le télétravail peut également réduire les dépenses associées à la vie professionnelle comme la restauration hors domicile ou la garde d’enfants ». 

Le télétravail dans les filières médicales

Dans son guide l’ANAP propose une cartographie des métiers éligibles au télétravail, autour de six critères majeurs : la nature des tâches, les matériels et les outils utilisés, le travail en équipe, la collaboration, la coordination, le critère de performance mesurable, la flexibilité temporelle et la présence de temps posé.

Aurélien Pierre : « Pour les filières médicales, le télétravail va plus facilement concerner les activités administratives, managériales, de recherche, de téléconsultation. Le télétravail est par exemple possible pour le chef de pôle, le chef de service, le médecin coordonnateur. Les sage-femmes qui font de l’éducation thérapeutique et qui réalisent des consultations peuvent être mises en télétravail pour ces activités. En revanche, dans la filière soignante, une infirmière qui n’a pas d’autre mission que de soigner son malade au chevet du lit, ne pourra pas télétravailler. C’est évident. Néanmoins dans certains services des praticiens hospitaliers peuvent télétravailler grâce à la télémédecine. C’est quelque chose qui est assez peu fait aujourd’hui dans les établissements publics, voire pas du tout. Ce sont donc de nouvelles organisations à définir et à trouver. Nous pensons que c’est une piste importante de travail pour l’attractivité des professionnels notamment ».

Les clés d’une mise en œuvre réussie du télétravail

L’ANAP propose 4 étapes pour mettre en œuvre le télétravail.

Première étape : réfléchir. Avant de se lancer, savoir ce que l’on veut. L’objectif est de répondre à la question : pourquoi j’adopte le télétravail dans mon établissement ou dans mon service ? L’enjeu est de produire un document synthétique comprenant les éléments clés qui seront utilisés pour l’accord collectif.

Aurélien Pierre : « Nous conseillons de constituer un groupe de travail interne. Il peut comprendre des membres des organisations syndicales, c’est important de les associer dès le départ, le directeur technique informatique, les managers, les professionnels de terrain qui vont être concernés par le télétravail, des membres de la CME, le DRH, le directeur des affaires médicales, le directeur des soins, le cadre de santé. Il est important d’adopter dès le départ de bonnes pratiques de suivi des réunions, notamment en identifiant un décisionnaire et un animateur de ce groupe. Tout le monde a des idées, a sa perception et sa volonté pour mettre en œuvre le télétravail, pour autant il va falloir un décideur ».

Deuxième étape : la négociation. Le télétravail implique un accord majoritaire des syndicats. Les objectifs sont de produire, négocier et valider officiellement un document encadrant le télétravail. Il s’agit d’un accord collectif pour le public ou une charte pour le privé avec les partenaires sociaux. Pour le public le document est la déclinaison de l’accord relatif à la mise en œuvre du télétravail dans la fonction publique du 13 juillet 2021. Pour le secteur privé, c’est un accord collectif ou une charte élaborée par l’employeur après avis du CSE.

Aurélien Pierre : « Ce qui est important dans cette étape de la négociation collective c’est de ne pas oublier les obligations de l’employeur. Informer les collaborateurs des modalités de mise en œuvre du télétravail, des dispositifs de contrôle, respecter les règles en matière de sécurité des systèmes d’information et de production de données, réaliser un entretien annuel intégrant les conditions d’activités et la prise en charge du télétravail. Respecter le droit à la déconnexion et la vie privée des collaborateurs. Prendre en charge les coûts liés au télétravail, etc. ».

Troisième étape : implémenter le télétravail. Il va être question de mettre en place efficacement le télétravail. Son implémentation doit être organisée et peut nécessiter des réorganisations complètes du service. Le télétravail doit être implémenté au regard de la charte ou de l’accord collectif.

Aurélien Pierre : « Quelques conseils : ne pas négliger le matériel fourni aux collaborateurs et la qualité des formulaires. S’adapter et ne pas hésiter à expérimenter si l’organisation est particulièrement innovante. Le télétravail se met en place à long terme. Cela va dépendre de la complexité, de la taille de l’organisation. L’implémentation est peut-être la phase la plus risquée. L’inégalité, le sentiment d’injustice, peuvent rendre le télétravail source de négativité, de conflits, s’il est mal fait. Pourquoi ce groupe de professionnel peut télétravailler et pas ce groupe-là ? C’est bien cela qu’il va falloir aussi décrire dans l’accord collectif ou la charte pour savoir qui a accès au télétravail et veiller à la mise en place uniforme de procédures au sein de l’établissement ».

Le télétravail s’intègre dans un système d’amélioration continue. La surveillance, le monitoring du dispositif doit être basé sur des indicateurs quantitatifs et qualitatifs. Tout changement doit être suivi et évalué. Aurélien Pierre : « C’est important de ne pas modifier intempestivement l’accord collectif ou la charte et surtout, être à l’écoute du terrain. Le groupe de travail interne peut continuer à suivre le télétravail. Il est également possible de nommer une commission pour créer et valider les demandes de télétravail. Quoi qu’il en soit il est impératif d’utiliser des indicateurs pour vérifier l’uniformité de la politique de télétravail au sein de l’établissement afin d’éviter les conflits et le sentiment d’injustice ».

(*) Boell et Al, 2013 / Barrero et Al, 2020

Partager cet article

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.